L’investissement dans les T.I.C en Afrique Centrale et de l’Ouest

Ci-dessous un bilan de Novatech 2006 (annoncé depuis quelques mois sur ce blog) qui s’est tenu à Bamako au Mali du 07 au 09 novembre dernier ; bilan fait par M. Michel TOWA KOH, Coordonnateur National ACSIS Cameroun.

La conférence sur l’investissement dans les T.I.C en Afrique de l’Ouest et Centrale, (Novatec 2006) s’est tenue du 07 au 09 Novembre ? Bamako au Mali. Elle a regroupé 450 participants venus de 18 pays Africains et de 10 pays Européens. Cette conférence est une initiative du C.D.E (Centre de Développement des Entreprises) et de Proinvest(un programme de l’Union Européenne) en partenariat avec la C.E.M.A.C (La Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale) et de l’U.M.O.A (Union Monétaire de l’Afrique de l’Ouest).

De nombreux gouvernements Africains y ont envoyé des délégations officielles. Etaient également présents des régulateurs africains et de gros financiers tels que l’A.F.D (Agence Française de Développement), la B.A.D (Banque Africaine de Développement) ou encore la B.E.I (Banque Européenne d’Investissement).

La délégation officielle Camerounaise, sous la houlette du Ministre des Petites et Moyennes Entreprises, conduite par le sous Directeur des PME, Monsieur BAGDA Jean Marie Louis, comptait en son sein des opérateurs économiques porteurs de projets. D’autres structures telles que l’A.R.T, l’observatoire de l’emploi et de la formation professionnelle sans faire partie de la délégation officielle étaient également présentes. Le Cameroun comptait parmi les plus gros contingents. Novatech 2006 avait pour objectif :

De faire un état des lieux de l’investissement dans les T.I.C ;

  • D’apprécier l’environnement des P.M.E en Afrique ;
  • D’apprécier les conditions de leur financement et desciter des partenariats durables entre les PME ? travers des rencontres individuelles (B.2.B) ;
  • De jeter les bases d’un véritable développement des T.I.C en Afrique.

Il ne s’agissait pas d’une conférence qui s’arrête après 3 jours. Proinvest et le C.D.E. ont pris l’engagement de soutenir certaines P.M.E innovantes dans les T.I.C et d’évaluer à moyen terme les relations de partenariat qui se sont nouées pendant la conférence.

Absent le 1er jour pour cause de sommet Chine Afrique, le Président de la République Malienne a ouvert les travaux le 2e jour en soulignant que le Mérite de Novatech 2006 est « d’innover dans un domaine insuffisamment explorer en Afrique de l’ouest et du Centre. Celui de l’investissement dans les technologies de l’information. ».

L’Agenda de cet important événement prévoyait 3 plénières, 6 ateliers, des showroom et des B.2.B.

En ouvrant la plénière Mr Michel Rocard, Ancien Premier Ministre de la France, Député Européen et Président d’Afrique Initiatives, estime que ce salon est une grande chance pour l’Afrique, qui peut ? travers les tic combler son retard.

Monsieur Cheik Sy de Opensys va s’appesantir sur les possibilités que peuvent exploiter les P.M.E Africaines. Il insistera d’ailleurs pour que les pays Africains s’inspire de l’exemple Américain avec son Small Business Act, une loi qui garantit une part de marché aux P.M.E dans les marchés publics. Deux ateliers auront particulièrement attiré notre attention :

  1. Régulation et bonne gouvernance du secteur des Télécommunications en Afrique ;
  2. Le financement de la P.M.E en Afrique.

1. Régulation et bonne gouvernance du Secteur des Télécommunications

En ouvrant cet atelier, Monsieur Papa Mamadou Diop, Directeur des services d’informations ? l’U.E.M.O.A, a expliqué que l’entrée des pays africains dans la société de l’information impliquait de grands bouleversements (privatisation de l’opérateur historique, concurrence, …).

Ces changements imposent une régulation du secteur des Télécommunications. Cependant la plupart des régulations actuelles ne couvrent pas Internet ou les T.I.C en général. Elles ne couvrent que les infrastructures classiques.

Mr Koroney Massany, le Haut Commissaire aux T.I.C (Niger), affirme que son pays est le seul ? avoir ? ce jour une agence de régulation multisectorielle. Il a ajouté qu’au Niger :

  • La Privatisation de l’opérateur historique était effective ;
  • La politique des Télécommunications validée ;
  • Le plan National des Infrastructures de la Communication et de l’Information élaboré.

Le chantier sur le cadre juridique était en cours, notamment la loi sur le commerce électronique, la loi sur la cybercriminalité ou encore, la loi sur la signature électronique.

Pour lui, il faut une harmonisation des réglementations en Afrique car chaque pays pris tout seul ne constitue pas un marché attractif. Cette harmonisation des réglementations devra se faire en résolvant la question des barrières linguistiques.

Monsieur Jacques Blanché, Vice-Président d’A.C.P Numérique, pense qu’au-del? de l’impérative nécessité d’une harmonisation des réglementations, il faudrait peut-être envisager une structure supranationale de la réglementation, dans le même esprit que O.H.A.D.A (pour le Droit des Affaires) ou C.I.M.A (pour les Assurances). Une structure supranationale de la réglementation serait mieux ? même de gérer la question du service universel et surtout la question de l’indépendance des régulateurs. Les représentants de l’U.M.O.A et de la C.E.M.A.C ont reconnu que des directives étaient prises ? leur niveau malheureusement non appliquées par les pays membres.

Les régulateurs présents dans la salle ont confirmé l’étroitesse de la marge de manœuvre qui était la leur. Pour l’avocat Eric Vève, l’indépendance des régulateurs tient en deux points :

  1. Autonomie Administrative ;
  2. Autonomie Financière.

Sur le plan financier, les régulateurs ont généralement leur autonomie car il gère des taxes et autres redevances. Ce qui suscite d’ailleurs des convoitises.

Par contre sur le plan administratif, la réalité est tout autre.

La plupart des régulateurs ont le statut d’établissement public, de surcroît, dans des pays où la culture politique est ? la centralisation. Par ailleurs la collusion entre les agences de régulations et les opérateurs historiques aux mains de l’Etat est fréquente.

L’une des missions qui devra préoccuper les régulateurs dans les prochaines années c’est bien la voie sur IP.

2. Quelles solutions de Financement pour le secteur des T.I.C ?

Prenant la parole le Premier, Monsieur Eckard Hinje du C.D.E, a présenté une typologie des activités dans les TIC : des grandes infrastructures aux petits services pour P.M.E.

Les investissements vont de plusieurs millions d’euros pour les infrastructures ? quelques milliers d’euro pour les services aux entreprises. Les grandes sociétés de Télécommunication appartiennent aux Etats. Les grands projets d’infrastructure vont donc très facilement vers elles.

Les privés démarrent très souvent comme petits entrepreneurs. Leurs investissements sont très difficiles ? évaluer et par conséquent ils sont difficiles à financer.

Les P.M.E Africaines trouveraient davantage de financement dans la micro finance.

Madame Catherine Collin de la B.E.I a renchéri en disant que nonobstant les 2 milliards d’Euro que gérait le fonds d’investissement, il ne leur est pas aisé d’examiner directement les projets des P.M.E.

Les demandes des P.M.E sont étudiées ? travers des fonds d’investissements en donnant des lignes de crédits aux banques locales. Il y a, a-t-elle poursuivit des liquidités dans les banques locales qui ne sont pas utilisées pour les petits financements.

Le représentant de la B.A.D, Monsieur Mahim Cissé a fait le point sur l’engagement de la BAD dans les T.I.C.

La banque a été choisie comme partenaire par le N.E.P.A.D.

  • Elle soutient le projet de Satellite Africaine R.A.S.C.O.M.
  • Le projet de fibre optique en Afrique de l’Est : E.A.S.S.Y.
  • L’université virtuelle Africaine ;
  • Au guichet privé, la BAD a pris des participations dans des sociétés comme M.T.N Cameroun, Celtel etc.…

La B.A.D stimule l’utilisation des T.I.C dans les plans de développement. Elle dispose de deux guichets :

Public par exemple apport aux Régulateurs

Privé : elle accorde des prêts ? long et moyen terme.

Elle prend également des participations dans des entreprises. Pour les P.M.E la B.A.D intervient indirectement en accordant des lignes de crédit aux banques locales.

Philippe Vavasseur, Directeur de l’A.F.D (Mali) à son tour précisera que l’A.F.D (l’Agence Française de Développement) investit surtout dans les grandes infrastructures. Elle peut également investir dans des activités qui permettent de développer du chiffre d’affaire :

  1. Education ;
  2. Santé ;
  3. Connectivité des zones rurales.

L’AFD intervient également pour renforcer les activités des promoteurs privés ? l’exemple d’Interswitch, PME au Nigeria spécialisée dans les e-services aux banques.

Une structure qui est entièrement tournée vers la PME c’est Synergie Niger. Son représentant Mahame Kabo précise que l’on distingue trois grands secteurs :

  • L’informel ;
  • Les filiales des grands groupes ;
  • Les PME.

Les deux premiers ont résolu leur problème de financement : tontine familiale pour l’informel et banque pour les filiales de grands groupes.

Manque les P.M.E. Synergie veut occuper ce terrain. Synergie intervient dans le financement des P.M.E notamment en y prenant des participations ? hauteur de 25% pendant 4 ans.

Le jeu des questions – réponses qui a suivi a révélé que les porteurs de projets présents trouvaient insuffisants les efforts des financiers, il est également apparu que les bourses de valeurs qui se mettent en place en Afrique ne répondent pas aux besoins des P.M.E.

La B.A.D, la B.E.I et l’A.F.D ont soutenu en cœur qu’elles allaient davantage soutenir les P.M.E Africaines. Elles ont exhorté les PME à se regrouper en réseau et c’est ? travers ces organisations intermédiaires et les fonds d’investissement qu’elles ne manqueront pas de créer que les gros financiers soutiendront la PME Africaine. Une ONG Française COFIDES a annoncé qu’elle prenait en charge les garanties (? hauteur de 10 Millions de francs CFA) souvent exigée par l’organisme de financement.

Quelques retombées positives. A l’issue de cette conférence Mr Ahmed Sow Directeur de C.D.E (Centre de Développement) a révélé que les rencontres d’affaires ont donné lieu ? prés d’une centaine d’accords de partenariat. D’autres entreprises ont choisi de poursuivre les discussions. Des mécanismes de financement ont été mis ? la disposition de plusieurs entreprises innovantes. Le C.D.E suivra et évaluera les accords de partenariat et les négociations en cours.

Certaines entreprises se sont distinguées :

  1. G.T.S Infotel Nigeria du Camerounais Kamanou ;
  2. Synergie du Niger ;
  3. Captic le réseau des acteurs privés des TIC du Mali.
  4. Le 1er prix Novatech 2006 est revenu ? la société Interswiches du Nigéria.
  5. Le second prix ? Matrix du Cameroun.

Les pays d’Afrique Centrale ont pu constater leur retard en terme de créations d’organisations intermédiaires par rapport à l’Afrique de l’Ouest. Aussi ont-ils décidé que dans chaque pays de la CEMAC les acteurs privés des TIC se regrouperont en réseau et qu’une fédération de ces réseaux sera créée.

Après un lobbying de la délégation camerounaise et des représentants de la CEMAC auprès du C.D.E, celui-ci s’est engagé ? appuyer la mise en place de ces réseaux en zone CEMAC. Le C.D.E a également donné son accord de principe pour renforcer le SIMEN (Salon International du Multimédia et de l’Economie Numérique) qui se tient du 8 au 12 Mai 2007 à Libreville (Gabon) si l’organisateur Gabonais acceptait d’élargir l’événement ? toute la zone C.E.M.A.C. Se serait l’occasion pour le programme Provinest de faire une évaluation en Afrique Centrale du chemin parcouru par les Acteurs privés des TIC depuis Bamako 2006.

Par M. Towa Koh Michel, Coordonnateur National ACSIS Cameroun